
Extrait de Spéléo Magazine n°45
La rouille Ou la vie humide de Jacques Orsola
Si Jacques Orsola avait eu un morceau de ferraille à la place de la main, il se serait certainement vu affubler du surnom de Cap’taine Crochet. Si Jacques Orsola avait fait de la radio un 18 juin à Londres, ses amis auraient certainement trouvé drôle de l’appeler Mon Général. Mais Jacques Orsola est roux, et à l’adolescence, ses potes du Montélimar Spéléo Club le surnomment » La Rouille « . Et, comme la rouille, la vraie, Jacques Orsola laisse des traces sur ce qu’il touche, par son humanité et son engagement dans le monde spéléologique.
Texte : Alain Doucé
C’est au début des années cinquante, alors que les grosses explorations vers les premiers moins mille font rage, que celui qui allait devenir » La Rouille » vit le jour. Son déniaisement souterrain, c’est à douze ans qu’il le fit, en 1963, avec un professeur de sports qui l’entraîne vers les noirceurs ardéchoises, lui et ses copains de classe, en activité parascolaire. Pour lui, la spéléologie ne fut pas un coup de cœur. Des souvenirs de ses premières sorties il en a peu, et si en 1967 il adhère un peu par hasard, au Montélimar Spéléo Club, c’est avant tout pour fuir le carcan familial, pour prendre son autonomie et retrouver ses potes.
Mai 1968 n’était pas encore passé par-là. Les amis, les explorations, voilà Jacques Orsola devenu La Rouille. La spéléologie devient son univers et notre homme écume l’Ardèche, le Vercors… Les années soixante-dix pointent le bout de leur nez avec son cortège de changement. Avec l’arrivée des nouvelles techniques de progression sur corde les anciens prennent peu à peu leur retraite souterraine tandis que les explorations de pointes se démocratisent. Les explorations lourdes avec un homme (ou une femme) au sommet de chaque puits deviennent obsolètes.
La Rouille, pour pouvoir concilier son activité professionnelle avec sa passion, tente des études de géologie et part pour Lyon. Voulant rester fidèle à son club d’origine, et avec le désir surtout, de ne pas être bloqué dans ses choix de sorties par une quelconque adhésion à un des vingt clubs lyonnais, il devient autonome ou individuel (c’est selon).
La Rouille, avec quelques associés, crée à Lyon la société » Spélémat » qui comme son nom l’indique vend du matériel spéléologique, mais pas seulement, de montagne également. C’est aussi pour lui le début des grandes expéditions à l’étranger. Nouvelle-Guinée, Chine, Caucase, Maroc, Mexique…
Quand tu as 30 ans, nous dit-il, et que l’on te propose des explorations à l’étranger, tu n’hésites pas. Faire une expédition spéléo, c’est également le prétexte pour aller voir ailleurs comment les gens vivent, pensent et réfléchissent.
Si aujourd’hui, La Rouille continue les explorations et les expéditions, depuis une dizaine d’années, il ne conjugue plus uniquement sa vie qu’avec le monde souterrain. Au début des années quatre-vingt-dix, il quitte ses associés de Spélémat pour d’autres activités. » Depuis 10 ans je suis un peu sorti du monde spéléo car à une époque, surtout dans le cadre de la FFS et de sa commission équipement, je voyais des spéléos toute la journée, je bouffais avec des spéléos, puis j’allais à des réunions le soir discuter avec des spéléos. Au bout d’un moment, vivre » la » spéléo 24 heures sur 24, c’est avoir peu à peu une vision de plus en plus étroite de notre univers. Quand tu es toujours immergé, rien ne te manque et puis, un moment, tu te dis que d’autres mondes existent. Peut-être avec l’âge tu te dis qu’il y a autre chose même si j’y suis toujours très attaché à ce milieu. » Relativisons tout de même ses propos. Ne plus être en permanence dans le milieu ne veut pas dire que l’on n’aperçoit plus Jacques Orsola. Que ce soit sous terre ou à au sein de la fédération notre rouquin est toujours très actif. Il anime et participe à la commission Documentation (la Co. Doc) et celle des relations et rxpéditions internationales (la CREI).
Pour lui, la pratique de la spéléologie aujourd’hui, en France, évolue avec la société. Si l’âge moyen des licenciés grimpe vers le haut, c’est peut-être dû à une approche plus consumériste des sports pour les jeunes, une dimension que ne pourra avoir la pratique souterraine. » La spéléo comme sport de masse, je n’y crois pas du tout. Il y a très peu de gens qui accrochent à la spéléologie. Se retrouver dans l’humidité, le froid, dans la boue, il y a un petit côté masochiste. Ce qui fait accepter cette dimension, c’est le côté découverte. Je ne pense pas que la spéléo gagnerait à devenir un sport de masse. En France ou en Europe Occidentale, nous avons une pratique très sportive de la spéléologie, alors qu’en Europe de l’Est ou en Amérique Latine, les pratiquants ont une approche plus scientifique « .
Sur un autre sujet sensible, qui fâche actuellement, La Rouille a aussi son point de vue : » les seuls compétents en secours spéléo, ce sont ceux qui pratiquent. Les corps constitués auront du mal à mettre en place des équipes pour couvrir le très petit nombre d’accidents qui peuvent survenir partout en France même si certains sont d’excellents spéléologues. En ce qui concerne l’aspect médiatique, il y aurait des secours spéléo deux fois par semaine, c’est sûr que les pouvoirs publics réagiraient, mais on en parlerait beaucoup moins dans les médias. Ce qui fait la valeur médiatique d’un accident spéléo c’est qu’il y en a très peu « .
Depuis 40 ans, La Rouille promène ses bottes sous terre, et même si aujourd’hui il en fait moins, c’est toujours l’exploration qui le fait vibrer, avec quand même cet aveu : » aujourd’hui, moins c’est sportif, mieux c’est… »
J’ai pas vu de peu Norbert Casteret ,mais j’ai une la chance de connaitre la Rouille. Je ne rappelle bien du matos que j’allais recherche vers les année 76 à Lyon Dommage ,je n’ai pas fait de spéléo avec toi .