
Texte et photos Franck Jourdan
Milieu 2004, Jacques nous téléphone à nouveau pour nous mettre l’eau à la bouche. Cette fois-ci nous ne pouvons pas faire machine arrière à la vue des photographies qu’il a pu se procurer.
Nous réunissons une petite équipe pour quelques jours sur cette Île entre Grèce et Turquie
Dès le mois janvier 2005, les billets d’avion sont réservés nous sommes sept : Franck Jourdan, Jean-François Fiorina, Charles Gilles, Philippe Buzzanca, Eric Blanc, Jean-Yves Gaultier et notre guide, presque devenu local, Jacques Cohen. Le rendez-vous est donné à Athènes, le 28 juillet 2005 à 7 heures.
Chaque membre arrivera à différentes heures de la journée, certains manqueront leur correspondance à Milan, d’autres arriveront très tôt afin de profiter des joies très nocturnes de la Capitale hellénique.
Sept heures, toute l’équipe est quand même prêt pour l’avion qui nous mène à Alexandroupoli. En bordure de la Mer Égée, un bateau relie l’île de Samothrace. Nous apercevons au loin.
Nous débarquons sur le petit port de Kamamariotissa, en début d’après-midi. L’envie de découvrir l’Île nous presse. Nous louons vite deux 4×4 et trouvons un logement chez l’habitant. Il est tard pour commencer une descente de torrent. La majeure partie des canyons ouverts se situe de l’autre coté de l’Île et nécessite un retour en bateau.
Cartes imprécises
Le lendemain, l’aventure peut débuter. Nous commençons par un petit canyon. Nous irons gérer l’organisation des bateaux dans l’après-midi. Nous nous dirigerons vers la partie la moins escarpée de l’île pour descendre le canyon de Therma. Au fur et à mesure du trajet Jacques nous indique les différents canyons qui ont été ouverts. Ceux-ci semblent très esthétiques.
Les cartes dont nous disposons ne sont pas franchement précises. Des ruisseaux ne sont pas mentionnés, d’autres n’existent pas, etc. Bref, nous nous laissons guider par la population locale qui nous dirige vers le petit canyon de Therma. Des pancartes en bois indiquent la direction des cascades.
Au bout de quelques détours dans le village de Therma, nous arrivons sur une placette sans issue, départ d’un beau sentier touristique. Un autochtone nous précise l’accès aux cascades.
Nous progressons sur un magnifique sentier bordé de platanes millénaires. Nous le quittons pour une petite sente qui nous dirige rapidement vers un enclos à chèvres en rive gauche.
On domine vraisemblablement la dernière cascade de la descente, une chute d’eau de 13 mètres. Le sentier continue de monter et contourne le ruisseau. Nous apercevons un magnifique encaissement qui réjouit l’équipe. Nous poursuivons toujours notre ascension. Toutefois l’accès qui préconisait une heure est déjà dépassé. Des verrous rocheux se profil en amont au fur et à mesure de notre progression. (??? …)
Le chemin disparaît. Nous nous frayons un passage qui ressemble au maquis Corse. Nous longeont le ruisseau. Nous rejoignons ensuite les rives du ru au début d’un encaissement. Franck descend dans le torrent jusqu’au départ d’une cascade. Cette dernière est vierge d’équipement.
Interrogations ?
Des questions fusent au niveau de l’équipe ?
Sommes-nous trompés de ruisseau ?
Pourquoi nous marchons depuis plus de deux heures alors que les indications que nous avons glané donnaient une heure ?
Et la dernière question mais la principale dans l’esprit du groupe : Allons nous faire une première, oui ; non ?
Plus haut le ruisseau s’ouvre. Des cascades apparaissent. Nous remontons légèrement dans le lit du ruisseau pour changer de rive et progresser en rive droite. Les cascades se succèdent sans interruption, nous les remontons une à une jusqu’à aboutir au niveau d’un affluent rive gauche. Nous marchons depuis plus de trois heures et nous sommes déjà à 700 mètres d’altitude.
Franck et Jean-Yves remontent sur une arête entre les deux ruisseaux. Sur le ruisseau principal, ils dominent et scrutent un long plan incliné de plus de 80 mètres sans intérêt et arrivent sur un vaste chaos de bloc qui compose le bassin-versant. L’affluent ne présente aucun intérêt. Le point de départ est bien la confluence des ruisseaux à 700 m d’altitude.
Le paysage ressemble à la Corse. un canyon avec de magnifiques dalles de granite bien polies. Les cascades d’une beauté impressionnante s’évitent facilement sur les rives. Certaines donnent lieu à de magnifiques glissades dont une de 13 mètres !
On peut sur certaines se laisser glisser sur leur moitié : un aqualand géant au centre de la Méditerranée. Au bout d’une heure de de jeu aquatique nous arrivons au niveau d’un resserrement. Effectivement Franck avait dit vrai. Une cascade de 45 mètres n’est pas équipée. Avait-elle été contournée dans la végétation lors de l’ouverture ? Nous installons un amarrage sous un bloc et descendons dans l’encaissement.
Les ressauts et cascades se succèdent rapidement. Une D5, une C20 que nous équipons directement sur un arbre. Une cascade de 32 mètres que nous évitons en empruntant la rive gauche. L’encaissement s’accentue et une magnifique C17 plonge dans une étroiture. Un amarrage naturel est impossible. Nous en sommes désormais certains. Nous sommes les premiers à réaliser la descente de ce canyon ! Le bonheur n’en est que plus savoureux.
Fort heureusement la trousse à « spit » est présente dans un de nos sacs. Charles Gilles se fait un plaisir de poser le premier point de cette descente.
Nous progressons rapidement dans un bel encaissement agrémenté de quelques désescalades, quelques petits sauts et beaux toboggans.
Scintillantes strates de quartz
Nous équipons une autre cascade de 19 mètres en fixe. Quelques désescalades plus loin, dans un nouvel encaissement, s’ouvre une des plus belle chute d’eau du parcours. Une C27, sur une roche noire striée de scintillantes strates de quartz. L’amarrage naturel est évident sous un rocher. Nous poursuivons. Les parois s’effacent. Nous progressons maintenant dans un ruisseau bordé d’un joli maquis. Soudain au détour d’un virage, nous devinons une cascade. Trente cinq mètres ? Qui domine ensuite une autre cascade. Nous n’arriverons pas à estimer la hauteur totale.
Rapidement, la réponse est donnée : Une C60, composée d’un palier intermédiaire. Elle sera descendue d’un seul jet. Encore un rappel de 15 mètres et nous arrivons au milieu de platanes, d’un autre temps, où la rivière se fraye tranquillement son chemin.
Nous marchons 20 minutes au milieu de ses feuillus géants en désescaladant encore quelques ressauts humides avant d’arriver, au niveau de l’enclos à chèvres, laissé au cours de notre marche d’approche. Le retour est maintenant évident.
Il nous a fallu 4 h 30 pour réaliser cette descente, avec en plus les 3 h 00 de marche d’approche. Nous sommes loin du petit canyon de la demi-journée. Cependant le plaisir d’avoir effectué une première compense des l’imprécision des cartes que nous avons.
Une petite aventure qui finira autour de quelques verres de Uzo, et de multiples plats locaux jusque tard dans la soirée. Avec tout ceci, nous n’avons pas géré le problème des bateaux. Nous envisagerons demain, si nous ne réalisons pas une autre première.
Pays : Grèce
Commune : Therma
Cartes : Carte I/30.000e° « Samothraki » N° 215 aux éditions Road Éditions.
Altitude de départ : 700 mètres
Dénivelé : 600 mètres
Distance : 3 000 mètresTemps d’approche : 3 h 00
Retour : 0 h 20
Descente : 4 h 30Cordes : 2 x 65 m
Roche : Granite
Cotation : V4-A2-III
Caractère Aquatique :
Un léger débit constant tout le long de l’année, avec de grosses pointes lors du printemps ou après de longues journées de pluies. Attention ce ruisseau peu se charger rapidement lors d’un gros orage sur son bassin-versant.Pour information, le débit du canyon, lors de la période estivale : 5 à 10 l/s
Accès :
Aval : Du port de Kamariotissa, se rendre à Therma. Face au port quitter la route principale et prendre la route des thermes. Un peu avant ces derniers prendre à gauche et continuer la route jusqu’à son terminus : une voie sans issue sur une placette ronde.Amont : De la placette, à pied, prendre un grand sentier qui remonte le ruisseau de Plata, ainsi qu’une canalisation. Au bout d’environ dix minutes de marche, un petit sentier part à droite, monte et rejoint un enclos à chèvres et les bords ruisseau (Rive gauche).
Un sentier à chèvres continu à monter en longeant le ruisseau. Il s’en écarte au bout d’environ une heure de marche. Revenir en sa direction et se frayer un sentier dans le maquis, toujours en longeant en hauteur sa rive gauche. Au bout d’un moment on peut rejoindre aisément la rive gauche du ruisseau. Il faut passer alors au-dessus de quelques obstacles et d’un encaissement. On rejoint la partie haute et la plus ouverte du canyon (parties des grandes dalles de granite). Remonter les cascades en rive droite jusqu’à un affluent rive gauche, au niveau du point 700.
Le retour s’effectue au niveau de l’enclos à chèvres croisé lors de la marche d’accès.
Infos diverses :
Ce ruisseau présente un équipement de première descente. Lors d’un débit conséquent certaines désescalades devront être équipées. Une trousse à Spits nous semble indispensable.Il existe diverses cartes de l’île sous plusieurs éditions. Dans certaines cartes, le ruisseau n’existe pas, dans d’autres ils portent le nom de « Plata ». Sur la carte que nous avons proposé le ruisseau existe mais ne possède pas de nom, néanmoins l’accès routier est le meilleur. Sur cette carte, le ruisseau est celui qui coupe le nom de Therma en la lettre « e » et « r ». Le premier ruisseau est le canyon de Therma.
Toutefois nous ne disposions pas de cette carte avant l’ouverture mais une carte au 25 000° écrite en Grec (courage).