
PROPOS RECUEILLIS PAR ALAIN DOUCÉ
Si l’Europe monétaire existe, qu’en est-il de l’Europe des spéléos ? Que pèse le milieu spéléologique dans l’Union Européenne ? Avec Olivier Vidal, coordinateur de Vercors 2008 et Secrétaire Général de la Fédération Spéléologique de l’Union Européenne, zoom sur un événement d’ampleur européenne et une fédération devenue incontournable.

Au départ il y avait une motivation affichée, d’une part de coordonner nos actions au niveau européen puisque la législation européenne devenait de plus en plus importante, voir pesante, de l’autre d’obtenir des financements de la Commission Européenne — un objectif qui n’a quasiment pas été atteint jusqu’à présent.
À l’origine de la FSUE, il y a donc la loi etl’argent?
C’était ça, plus une volonté toujours affichée de mutualiser les échanges bilatéraux entre les pays européens. Si la FFS a depuislongtemps, notamment depuis la création de sa commission «relations et expéditions internationales» (CREI) des échanges très soutenus avec l’ensemble de ses voisins européens et plus loin, ce n’est pas le cas de tous les autres pays.
Certains ont moins d’incitation financière de la part de leur gouvernement pour conduire une politique internationale. La fédération européenne permet de faciliter ces échanges. Il y a des rassemblements européens, et plutôt que d’en faire 10 ou 20 d’ampleur nationale pour voir tout le monde, un seul suffit 1.
Il existe déjà l’Union internationale spéléologique (UIS). La FSUE n’est-elle pas uneinstance de plus ?
C’est une très bonne question. Certains àl’UIS craignent que la Fédération européenne prenne la place de UIS, vu le poids prépondérant des spéléologues européens.
La FSUE a peut-être été un “machin” de plus au départ, mais je suis convaincu qu’au-jourd’hui elle est en train de devenir LA fédération qui fédère les spéléos européens,tout comme la FFS a fédéré les spéléos français.
La FSUE pour moi aujourd’hui, c’est l’équivalent de la NSS aux Etats-Unis qui représente 12000 fédérés. La FSUE c’est un potentiel de 40000 fédérés. Sur les 27 pays de l’UE, 22 ont des spéléos et des fédérations, et sur ces 22 pays, il y en a environ les 2/3 qui sont membres de la FSUE, soit 30000 spéléos à peu près.
Toutes les plus grosses fédérations, (dans l’ordre: la France, l’Espagne, l’Angleterre, l’Italie et l’Allemagne) sont actives dans laFSUE.
Pour moi, il n’y a pas concurrence entre la FSUE et l’UIS: la FSUE c’est l’Europe, l’UIS c’est le monde entier. Il y a 200 pays dans le monde dont une bonne centaine possède une structure spéléo. À la FSUE, ce sont des commissions techniques sur les expéditions, sur les publications européennes, la médecine, la protection des cavités en Europe, etc. À l’UIS ce sont plutôt des commissions scientifiques, et ça, il n’est pas question de les dupliquer à la FSUE. Pour ce qui est des autres commissions techniques de l’UIS que sont: l’enseignement, les secours et la plongée, les 3 présidents sont aujourd’hui français (Marcel Meyssonnier, Christian Dodelin et Philippe Brunner), et nous travaillons en très bonne intelligence entre l’échelon européen et l’échelon international. Êtes-vous nombreux à la FSUE pour re-présenter tant de monde ?
C’est vrai que personne ne se bouscule aux portes pour être membre du bureau de laFSUE (élu pour 4 ans)! C’est un peu comme pour le Comité Directeur de la FFS, où toutes les places ne sont pas pourvues. On a la même problématique à la FSUE, avec la difficulté supplémentaire de la langue. Notre président est espagnol et ne parle que salangue! Il faudrait à la FSUE que chacun parle au minimum l’anglais plus une des 3 principales langues européennes.
Quelles ont été les avancées de la FSUE?
De 90 à 92 il y avait une très forte motivation, mais l’absence de subventionnement par l’Union Européenne a démotivé beaucoup de monde. Quand je suis arrivé au sein du bureau en 1999, j’ai réinjecté de l’énergie à la structure. Il n’y avait pas les outils habituels de communication fédérale (site Internet, lettres d’informations). Les bases d’une fédération européenne n’étaient pastotalement acquises et il a fallu les créer. Quand je suis revenu en 2005 après avoir travaillé dans l’humanitaire, on a pas mal échangé avec Bernard Lips, le président dela FFS. Il m’a dit que ce serait une bonne idée queje redevienne secrétaire général de la FSUE de manière à ce que de véritables groupes de travail européens se mettent en place. Il y avait des nouvelles qui circulaient, un site qui existait, mais rien de bien concret pour toucher les spéléos en Europe. Bernard Lipsa été un peu le révélateur. J’ai lancé des idées, dont Vercors 2008.
La FSUE a bientôt 18 ans. Est-ce l’âge dela maturité ?
En 1999 on a doté la fédération d’outils de communication et en 2005 on a démarré tout de suite par des actions très concrètes. Il y a eu des listes de diffusion, le FSUE’mail, qui sort tous les 3 à 4 mois en anglais et en français de manière à relayer très largement l’information. Il y a eu la création des Euro Speleo Forum, rencontres européennes annuelles dont les premières ont eu lieu en 2006 à Séville puis en 2007 en Suède.
Le prochain Euro Speleo Forum sera Vercors 2008. Il y a également la création del’Euro Speleo Project, l’équivalant du FAAL (Fond d’Aide aux Actions Locales) mais à l’échelle européenne. C’est une aide morale, technique et financière à tous les projets spéléo qui regroupent au moins cinq pays européens. Et le nouveau projet est de créer le label EuroSpeleo Protection (pour la protection des cavités, voir encart).
Il y a une reconnaissance: nous faisons partie de plusieurs groupes de travail de la Commission à Bruxelles. On nous invite à toutes les réunions de l’Unité Sports en tant que fédération sportive européenne, et nous sommes de plus en plus reconnus au niveau environnement avec des avis très positifs. Comme personne d’autre ne peut se targuer de pouvoir parler du milieu souterrainen connaissance de cause, nous faisons vraiment office d’experts.
Même si ce que l’on dit n’est pas toujours pris en compte dans les faits, c’est au moins entendu et reconnu. En tant que fédération européenne nous sommes représentatifs des spéléos. Quant à passer à l’étape suivante : traduire cette reconnaissance en actions concrètes (modification de lois, déblocage de fonds, lancement de projets de l’Union européenne concernant le milieu souterrain), nous n’en sommes pas encore là. Est-ce que ça va venir dans 6 mois, 1 an ou 10 ans ?.. C’est difficile à dire. Mais pour moi, il est clair que dans les 5 ans qui viennent des choses vont mûrir.
Que fait la FSUE concernant la législationsur les équipements de protection indivi-duelle (EPI) ?
Quand on a commencé à en parler en 97, j’étais coordinateur du groupe VG Norm qui travaillait sur les EPI au niveau de la FFS, eton a beaucoup planché sur la norme européenne, sur les cordes semi-statiques. On a fait tout un travail de lobbying et réussi à convaincre l’Europe de ne pas interdire les cordes de moins de 9mm, ce qu’elle voulait clairement faire. En parallèle, la FFS a émis des recommandations fédérales pour les cordes de faible diamètre. La plupart des normes EPI ont été entérinées entre 1997 et 2000.
Le problème des EPI aujourd’hui ne se situe pas au niveau de l’Europe, mais du gouvernement français.
Celui-ci veut soumettre en cette matière les clubs amateurs au code du travail, qui impose un taux de renouvellement du matériel. Ce n’est pas acceptable. Mais c’est un problème franco-français.
Appel à projets
C’est avec plaisir que la FSUE annonce le premier appel à projets de protection des cavités pour le Label «EuroSpeleo Protection» de l’ECPC (Commission européenne de protection des cavités FSUE). En effet depuis son origine en 1990, la FSUE a essayé de promouvoir la protection des cavités à l’échelle européenne. 17 ans plus tard, l’assemblée générale FSUE a décidé en août 2007 en Suède d’envoyer à travers l’Europe cet «appel à projets de protection des cavités» que nous avons appelé «EuroSpeleo Label».
Il s’agit d’un prix spéléologique européen géré par l’ECPC, financé par le budget FSUE. Le Label EuroSpeleo Protection aidera à promouvoir dans les clubs spéléologiques en Europe les activités de protection des cavités conçus sur un mode écologique intégré. Cela permettra également de montrer au niveau européen l’état de l’art des spéléologues en matière de protection des cavités, en prenant en compte les directives environnementales de l’UE, les principes d’administration des sites Natura 2000 et les Guidelines IUCN sur la protection des cavités et du karst. Quels types de projets peuvent candidater ?
Le Label EuroSpeleo Protection sera décerné à un seul projet de protection de cavité pour l’année 2008, durant le Congrès européen de spéléologie dans le Vercors. La sélection sera faite par un jury spéléologique européen composé par les membres de la direction ECPC et du bureau FSUE. Tout projet visant à protéger des cavités, qui soit mené par un club, comité local ou commission nationale d’un pays membre de la FSUE peut poser sa candidature. Le projet devra recevoir l’approbation de son organisation spéléologique nationale.
Quels sont les critères pour recevoir le Label EuroSpeleo Protection FSUE et quel est lemontant du prix ?
La candidature doit présenter un projet qualitatif avec des solutions implémentées qui peuvent être reproduites dans de nombreux pays d’Europe. Il n’est pas besoin d’avoir la participation de spéléologues de différents pays, mais la diffusion de la présentation et des résultats du projet doivent être faits dans un esprit qui peut être reproduit dans d’autres régions et pays européens.Les candidatures doivent être envoyées à protection@eurospeleo.org avant le 10juin 2008 dans au moins trois langues (français, anglais et une autre langue nationale
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européenne choisie par le candidat). Le rapport final devra être réalisé dans les mêmes langues afin de faciliter la diffusion de l’information à travers l’Europe.
La candidature comprendra, en plus du formulaire de demande rempli (disponible à protection@eurospe-leo.org), un texte de description incluant les chapitres suivants et comportant un nombre minimum de mots spécifié ci-dessous: – 1: présentation des besoins et des contraintes en matière de protection dans le pays/région du candidat (300mots) – 2: durabilité écologique intégrée à long terme (400mots) – 3: fondations scientifiques et techniques des solutions choisies (300 mots) – 4: qualité technique de l’implémentation (300 mots) – 5: résultats attendus du projet (200 mots) – 6: résultats de l’étude d’impact du projet (200 mots) – 7: programme chronologique d’implémentation (200 mots) – 8: implication des spéléologues locaux (150 mots) – 9: implication de partenaires extérieurs(150 mots) – 10: communication envers la communauté spéléologique (100 mots) – 11: communication avec les médias et le public (100 mots) – 12: Principales références/expériences passées de l’organisation en Protection des cavités (150 mots). Pour la première année de fonctionnement, 500€ ont été budgétés pour le projet sélectionné. Si nécessaire cette ligne budgétaire pourrait être revue en fonction du nombre de projets reçus. Que doit-on faire si l’on obtient le Label EuroSpeleo Protection ?
Le projet primé devra envoyer une publication sur ses résultats avant le 15 décembre 2008. Cette publication pourra prendre la forme d’un article d’au moins 5000 mots rédigé dans les 3 langues de la candidature, et développant entre autre l’information de chacun des chapitres du texte de description de la candidature.
Ce pourra également être une publication complète dans les mêmes 3 langues. La publication devra être envoyée sous format électronique (doc ou RTF).Toutes les publications devront inclure le logo FSUE etla mention «FSUE EuroSpeleo Protection». Le prix financier sera mandaté dès réception de la publication. Christiane Grebe (responsable FSUE-ECPC)
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